Planète à l’agonie : Quel avenir pour la Tunisie ?
Par Nesrine Zinelabidine
Depuis l’aube des temps, l’être humain entretenait des liens inhérents avec son environnement mais, dans un monde de plus en plus rude et de moins en moins prévisible, l’Homme a progressivement détérioré cette liaison.
En effet, aveuglé par son envie insatiable de tout contrôler, l’être humain a fini par tout endommager créant ainsi une perturbation de l’équilibre naturel et un bouleversement des conditions météorologiques d’où le réchauffement climatique.
Ce phénomène qui ne connait pas de frontières a fini par toucher la Tunisie, un pays qui s’inscrit sur la voie d’un développement à faible intensité carbone (0.007%), donc un pays qui est supposé être à l’abri des conséquences du réchauffement climatiques.
Paradoxalement, la Tunisie, malgré elle, se trouve réellement touchée par l’impact du réchauffement climatique qui ne cesse de se faire ressentir de plus en plus à travers plusieurs indicateurs telles que la baisse considérable des précipitations, la sécheresse, les inondations, les vagues de chaleur qui s’étalent jusqu’au mois d’octobre et les incendies.
➢ Les scientifiques ont défini à priori quatre scénarios d’émission de gaz à effet de serre qui constituent la base du calcul des futurs climats possibles ; Le RCP 4.5 étant le scénario qui présente un futur où certaines mesures sont prises pour limiter les changements climatiques et le RCP 8.5 étant le scénario le plus pessimiste en termes d’émission de gaz.
Evolution du cumul des précipitations en Tunisie
Les projections climatiques prévoient une baisse des précipitations sur la Tunisie en 2050 qui peut varier entre 6%, selon le scénario RCP 4.5, et 9%, selon le RCP 8.5, par rapport à la valeur actuelle. Cette réduction engendrerait une élévation au niveau de l’intensité ainsi que la fréquence des phénomènes d’inondations et de sécheresse et mettra en péril tout le secteur de l’agriculture.
En effet, le nombre de terres cultivables chute de 3% chaque année touchant non seulement la production oléicole qui, selon l’Office national de l’huile, devrait baisser à 200 000 tonnes en 2022/2023, mais aussi de la production céréalière qui, selon l’Union tunisienne de l’agriculture et de la pêche, pourrait se réduire à 1,8 millions de tonnes. Ceci sous-entend que la pénurie des produits alimentaires en Tunisie est loin d’être passagère, de même pour la hausse des prix et la dégradation du pouvoir d’achat.
Évolution de la température moyenne annuelle en Tunisie
A cause des gazes à effet de serre produits principalement par les grandes puissances, la chaleur conservée par la terre a manifesté une hausse sans précèdent.
Dans ce contexte, les dernières études ont prévu une augmentation significative de la température moyenne annuelle en Tunisie d’environs 1.9°C d’ici 2050, et que dans le pire des scénarios, la température moyenne en Tunisie pourrait grimper jusqu’à + 2,5°C.
Ce changement climatique a poussé les écosystèmes au-delà de leurs capacités de s’adapter ce qui a mis la faune et la flore en danger et a mené à la destruction de la biodiversité, d’ailleurs la hausse de la température en Tunisie a provoqué des incendies récurrents qui ont dévoré des hectares d’arbres, des animaux ainsi que de nombreuses insectes.
Elévation du niveau de la mer
Selon le rapport de GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat), basé sur le scénario RCP 8.5, la Tunisie subirait une augmentation moyenne du niveau marin de 30 à 50cm à l’horizon de 2050, c’est à dire que certaines zones côtières du pays seraient menacées de disparition, d’ailleurs 127 Km des plages ont déjà subi une érosion, par conséquent, les écosystèmes côtiers seraient détruits et le patrimoine culturel et historique serait délabré.
Encore, cette élévation épuiserait les réserves des nappes phréatiques littorales et empirerait d’avantage le problème de pénurie d’eau que la Tunisie affronte entravant ainsi l’activité touristique, agricole et économique du pays.
Selon le GIEC, la répartition des émissions de gaz à effet de serre est la suivante :
– 34% viennent du secteur de l’énergie,
– 24% de l’industrie,
– 22% de l’agriculture,
– 15% des transports,
– 5 % pour le reste.
Solutions :
Afin de sauver la terre et éviter des scénarios catastrophes à préjudices irréversibles, il est impératif de trouver des solutions pertinentes et c’est ainsi que les experts du GIEC ont proposé de :
-Substituer les énergies fossiles (pétrole, gaz, charbon) par des sources d’énergie bas-carbone (l’énergie éolienne, le solaire ou l’hydroélectricité)
-Mettre en place des techniques d’élimination du dioxyde de carbone tels que la plantation des arbres et décarbonisation de l’air.
-Limiter tout type de gaspillage notamment le gaspillage d’aliments et d’eau.
-changer ses habitudes de transport
Dans le même contexte la Tunisie a confirmé son ambition ainsi que son engagement au niveau international à réduire l’intensité de ses émissions de CO2 de 41% d’ici 2030 par rapport à la valeur de 2010.
La Tunisie envisage aussi de s’engager avec le fonds vert pour le climat, un projet qui lui permettra d’accéder à des ressources considérables pour financer la mise en œuvre des stratégies de lutte contre le changement climatique.
Encore, Kumulus qui est une startup tunisienne basée en France a proposé un appareil qui pourrait beaucoup aider à élargir l’accès à l’eau.
En termes de sensibilisation, le mouvement strike for climate in Tunisia s’est mobilisé pour faire appel à la justice climatique et propager la prise de conscience environnementale.
Aujourd’hui et plus que jamais, les experts insistent sur l’urgence de la situation et dans l’absence d’une volonté politique de passer à l’action, tous les efforts acharnés pour trouver des solutions, seront réduits à néant par conséquent l’environnement sera face à des défis qui le dépassent et l’Homme sera face à un point de non-retour.